Le Mirage 2000
En
1972, l'Armée de l'Air établit une fiche-programme
concernant un biréacteur de chasse et d'interception destiné
à remplacer à l'orée des années 80,
ses avions de type GAMD Mirage IIIC & IIIE, en service depuis
respectivement dix et six ans. Ayant alors, avec le Mirage F-1C
qui est sur le point d'être livré à la 30ème
Escadre de Chasse de Reims, abandonnés le principe de l'aile
delta qui les a rendu mondialement célèbres, les AMDBA
(Avions Marcel Dassault-Bréguet Aviation) étudient
un biréacteur à ailes classiques présentant
une forte flèche, et répondant aux besoins exprimés
l'ACF (Avion de Combat Futur). Heureusement, comme à son habitude, le bureau d'études
de l'avionneur à Saint-Cloud possédait de nombreux
projets d'avance dans ses cartons. Deux d'entre eux, étudiés
dès 1972 à l'aide du système de CFAO (Conception
et Fabrication Assistées par Ordinateur) CATIA, étaient
dérivés du Mirage III dont plus de 1400 exemplaires
furent finalement vendus à 21 forces aériennes à
travers le monde. Basée sur la méthode dit des «
éléments finis », qui consiste à découper
un ensemble en différentes parties suffisamment détaillées
pour effectuer un calcul global de répartition des efforts
structuraux et des écoulements aérodynamiques, ces
études permirent d'optimiser les formes, de simplifier les
structures et de réaliser « in fine Pour en revenir au Mirage 2000, on aurait cependant tord de le considérer comme une simple évolution du Mirage III. Ainsi, le retour à une configuration delta, a-t-il été justifié par les grandes qualités de ce type de voilure, dont on avait pu, enfin, « gommer » tous les défauts. De structure simple et facile à construire, cette aile permet l'emport d'un armement important et offre de grandes capacités de stockage en carburant, de par sa conception à partir de caissons multilongerons fait de panneaux servant de réservoirs structuraux de voilure. Offrant une traînée relativement faible et une charge alaire réduite, l'aile delta procure une grande maniabilité et est parfaitement adaptée au vol supersonique. Néanmoins, cette configuration présente un défaut majeur, qui explique son abandon provisoire par les AMDBA, avec le Mirage F-1. L'absence d'empennages et l'impossibilité d'y greffer un système d'augmentation de la portance, impliquent l'apparition d'une forte traînée due au cabrage maximum des élevons (volets du bord de fuite, positionnés près du fuselage et servant de profondeur) et à la forte incidence affichée par l'avion, lors des manoeuvres de décollage et d'atterrissage. D'où perte de vitesse... L'évolution sans cesse plus rapide de la technologie en ce milieu des années 70, permettait enfin de palier les défauts d'une aile construite pour un appareil conçu à la fin des années 50. L'augmentation de la surface alaire de 35 à 41 m2 impliqua une diminution de la charge alaire et une augmentation de la manoeuvrabilité. La disposition de becs mobiles sur toute la longueur des bords d'attaque offrit une cambrure variable permettant de réduire les vitesses d'approche et de décrochage. Enfin, l'adoption de CDVE et du concept CCV (Control Configurated Vehicle) associé, permit les manoeuvres avec de très faibles débattements de gouvernes, en gérant artificiellement la stabilité de l'avion, par la transmission très rapide des ordres aux gouvernes. D'où un contrôle très précis et total de l'avion dans les phases extrêmes de son domaine de vol (= + 29°, Vi = 100 kt). Ainsi, la vitesse d'approche d'un Mirage 2000 est-elle de 140 kt (260 km/h) contre 190 kt (350 km/h) pour son glorieux aine. Les CDVE du « 2000 » sont constituées par quatre chaînes indépendantes possédant chacune leur propre génération électrique. En outre, une chaîne d'ultime secours leur est adjointe. Même après deux pannes successives, ni la sécurité des vols ni les performances ne sont affectées. D'autres points ont été particulièrement étudiés. Les entrées d'air ont été optimisées à deux reprises pour l'alimentation des turboréacteurs SNECMA M53-5 puis M53-P2, beaucoup plus puissants que l'ATAR 09C du Mirage IIIE (9000 et 9700 kgp contre 6000 kgp). Ces manches à air sont notamment équipées de nouvelles « souris biconiques à section variable, adaptées automatiquement en fonction du nombre de Mach. De nouveaux Karman de raccordement ailes-fuselage ont été étudiés pour une meilleure répartition des efforts, pour réduire la traînée, augmenter la portance aux grandes incidences et accroître le volume offert pour l'emport de carburant et d'équipements. Des aigrettes à fort dièdre positif (+19°) ont été accolées aux entrées d'air pour améliorer la stabilité latérale aux grandes incidences. Enfin, un gain de plus de 20 % sur le poids total a été obtenu par l'utilisation de maténaux composites divers (bore, carbone et époxy) pour la construction de la dérive et de la gouverne de direction, des élevons, de la trappe du train avant et des portes de visite (certains de ces éléments ayant été, au préalable, testés sur Mirage III et F-I). Les disques de freins sont eux mêmes en carbone, d'où gain de poids, d'efficacité et d'endurance. Par ailleurs, un pare-brise panoramique, sans montants et résistant à un impact avec un volatile de 3 kg à 270 kt (500 km/h) a été réalisé, offrant ainsi une bien meilleure visibilité au pilote.
Cinq prototypes (dont un biplace) furent commandés aux AMD-BA, le premier avion de série devant sortir d'usine en 1982. En outre, c'est un total de 127 machines qui était planifié par la loi de programmation militaire 1977/1978. La fabrication des prototypes commença dès février 1976. Le 30 septembre 1977, le Mirage 2000-01 était livré en plusieurs éléments à Istres. Pendant les cinq mois qui suivirent, il y fut assemblé et subit les premiers essais. Enfin, le 10 mars 1978, le « 01 » effectuait son premier vol aux mains de Jean Coureau. D'une durée de 1 heure 05, ce vol permit d'atteindre une altitude de 40000 ft (13000 m) et une vitesse maximale de Mach 1,3, ce qui constituait une première mondiale en ce domaine. Par la suite, de 1978 à 1983, ce sont sept prototypes (toutes versions confondues) qui prendront leur envol. Certains d'entre eux étant, plus tard, modifiés pour servir à nouyeau de protos » à de nouvelles versions. Mirage 2000-01 Sans peinture pour ses premiers vols, il fut ensuite
peint en blanc avec des flèches bleu-blanc-rouge sur la dérive
et des flèches bleues de chaque côté du fuselage,
sur le bord d'attaque et le dessous de l'avion. Celui-ci est identifié
par l'inscription Mirage 2000-01 sous le cockpit. L'insigne de Jean
Coureau au diable rouge de la SPA 160 (aujourd'hui porté
par les Mirage 2000N de l'EC 02/004 « La Fayette »)
est placé sous la canopée, à gauche. Les cocardes,
situées seulement en intrados et en extrados de la voilure,
sont bordées de jaune.
Mirage 2000-02
Mirage 2000-03 Peint avec un schéma DA « Défense Aérienne » au bleu plus prononcé que le camouflage des avions de série, le Mirage 2000-03 arbore l'insigne de la SPA 93 (Col vert) et celui de la SPA 160 (Diable rouge) respectivement à droite et à gauche de la dérive. Sous l'aigrette gauche, est peint l'insigne de la SPA 69 (actuellement porté par les Jaguar A/E de l'EC 03/011 « Corse »). L'inscription « 03 » est peinte en gros au sommet de la dérive et Mirage 2000-03 l'est, à gauche sous la canopée. Enfin, sous le pare-brise un petit Col-vert surmonte huit Super 530 et un « Magic » qui rappellent les tirs effectués à Cazaux. Capable des radars RDM et RDI (Radar Doppler à Impulsions), le 2000-03 était propulsé par un SNECMA M53-2. Décollé pour la première fois par Guy Mitaux-Maurouard le 26 avril 1979. c'est en tant que prototype « Système d'armes du Mirage 2000 qu'il effectuera les essais du SNA (Système de Navigation et d'Attaque). Il est présenté au salon du Bourget de 1981. A partir de 1982, l'avion reste à Cazaux et effectue les vols d'intégration et de conduite de tir des Super 530 et « Magic » (tirs réels sur cibles). Le RDI est essayé à partir de 1983. Le 647éme et dernier vol constructeur est effectué le 31 août 1988 par M. Courtin du CEV, entre Cazaux et Istres. L'avion y est resté stocké jusqu'à son transfert le 20 mai 1992, à l'Ecole des Mécaniciens de l'Armée de l'Air à Rochefort. Mirage 2000-04 Peint aux couleurs des appareils de série de l'Armée de l'Air, l'avion arbore l'inscription Mirage 2000-04 sous la canopée, et « 04 » en gros, au sommet de la dérive. C'est de nouveau Guy Mitaud-Maurouard qui fait voler le premier le 2000-04 alors équipé du turboréacteur SNECMA M53-2, le 12 mai 1980. Au cours de cette sortie, Mach 1,5 et 42000 ft (14000 m) sont atteints. Mach 2 l'est à la troisième sortie de l'avion. Préfiguration de la série, le « 04 » effectue la mise au point de l'avion et de son système d'armes. Il est présenté au Bourget en 1981 et à Farnborough en 1982. Les essais effectués sur cet avion portent sur : les CDVE, le ravitaillement en vol de jour et de nuit, les essais de compatibilité radar/brouilleur en chambre anéchoide, des tirs canon de nuit, le ravitaillement en vol par Transall C-160NG, les essais RDM/ RDI, les campagnes de tir Super 530, la mise au point des conduites de tir « Magie » et Super 530, l'emport de charges diverses (bombes, réservoirs RPL 541 & 542 de 2000 litres, charges exportation...). L'avion a, depuis, été rendu capable de l'emport de missiles MATRA MICA (Missile d'Interception et de Combat Aérien). Il a effectué son premier vol dans cette configuration le 15 mars 1990 lors de son 732c vol, aux mains de Guy Mit aux-Maurouard. Mirage 2000B-01 Initialement peint en blanc avec parements bleus et rouges, l'avion reçoit ensuite les couleurs de l'Armée de l'Air. Il porte sous le cockpit avant, à gauche, l'insigne de Michel Porta à la Gypaéte de la SPA 153 (portée par les Mirage 111E de l'EC 01/003 « Navarre »). Le « 2000 B-01 » est équipé du turboréacteur SNECMA M53-5. C'est Michel Porta qui, le il octobre 1980, décolle le Mirage 2000B-01 pour la première fois. Après les premiers vols d'essais des spécificités biplace (conditionnement, CDVE, qualités de vol), l'avion est présenté au salon du Bourget 1981. Il réalise ensuite des essais d'emport, parmi lesquels ceux du missile nucléaire AEROSPATIALE ASMP (Air Sol Moyenne Portée) dont le premier vol sous fuselage remonte au 8 juillet 1981 (pilote : Hervé Leprince-Ringuet), et ceux du PDL (Pod de Désignation Laser) THOMSONCSF « Atlis ». Il participe aux meetings de Sion (CII) et de Farnborough en 1982, puis aux salons du Bourget en 1983 et 1985, de Gérone (Italie) en 1985, de Hanovre (RFA) et de Sion en 1986. Il effectue dc nombreux essais d'armement àCazaux (larguage et tir de l'ASMP en 1982), tirs avec le conteneur-canons AMD-BA CC-630 (vol n°762 le 25 octobre 1985). Le Mirage 2000 B-01 a également été utilisé à de nombreuses reprises pour des présentations en vol à des missions étrangères (Allemagne, Belgique, Chine, Indonésie, Japon, Qatar, Suisse, Turquie). Transformé en banc d'essais radar RDY, il poursuit ses essais depuis le CEV de Brétigny. Mirage 2000N-01 Originellement non peint, l'avion est camouflé gris-vert depuis le Vol n°7 L'insigne de Michel Porta (SPA 153) et de son navigateur Bruno Coiffet (scarabé de la 4B1) ornent le côté gauche, sous la canopée. L'appareil est peint en noir au sommet de la dérive et l'inscription Mirage 2000N-01 apparaît à l'avant de l'avion. C'est le 3 février 1983 que le « N-01 » décolle d'Istres pour la première fois, piloté par Michel Porta. Pour la toute première fois, au cours du vol n°34 à Cazaux, un Mirage 2000N largue un missile ASMP, inerte. Présenté au CEV en octobre 1983, le premier vol avec radar ESD « Antilope 5 » a lieu fin 1983. Les vols sont consacrés à la mise au point du SNA et du suivi de terrain en manuel, puis en automatique. L'anémométrie pariétale est également essayée. Le 2000N-01 effectue son dernier vol en tant que tel (vol n°615), le 2 mars 1990. Après une période de stockage, le 2000N-01 entre en chantier de modification, afin de devenir le prototype du Mirage 2000D. Mirage 2000N-02 Portant le camouflage des Mirage 2000N de série, le « N-02 » porte les insignes de la SPA 153 et de la 4B1 de ses navigants attitrés (Michel Porta et Bruno Coiffet). Sa dérive est ornée des insignes des SPA 37 (Charognard en vol) et 81 (Lévrier bondissant) de l'EC 01/004 « Dauphiné et de la SPA 124 (Tête de Peau-Rouge) de l'EC 02/004 « La Fayette », premières unités à s'équiper du « 2000N », et ce, en souvenir de sa présentation à la 4e Escadre de chasse de Luxeuil. Dernier prototype construit à neuf du Mirage 2000, il effectue son premier vol à Istres, aux mains de Michel Porta, le 21 septembre 1983. Il effectuera essentiellement des essais de SNA (suivi de terrain, essais de brouilleurs, emport d'ASMP...). Son 493e et dernier vol a lieu le 26 avril 1990. Il est ensuite stocké à Istres en attendant sa transformation en Mirage 2000D-02. Mirage 2000D-01 Ex-« 2000N-01 », le Mirage 2000D-01 présente
le même schéma de peinture que précédemment,
les inscriptions « D-01 » étant portée
en lieu et place de « N-01 ». L'insigne aux Léopards
d'or de l'EC 02/030 «Normandie-Niemen » de Dominique
Chenevier a également remplacé celui de la SPA 153
sous la canopée, à gauche. Mirage 2000D-02 Ex-« 2000N-02», le Mirage 2000D-02 présente
un camouflage intégral (intrados-extrados) qui sera celui
des Mirage 2000D de l'Armée de l'Air. Les modifications d'inscriptions,
d'insignes et d'équipements sont celles déjà
décrites sur le Mirage 2000D-01.
|